Je suis une Légende: Dorando Pietri (1885-1942)

L’adage affirme qu’on ne retient que les vainqueurs. Ce n’est pas tout à fait exact. Parfois, le deuxième devient plus grand que le premier et s’offre une place de choix dans la Légende et l’imaginaire commun. Dorando Pietri appartient à cette catégorie.

Si l’arbre généalogique de Philippidès pouvait être établi, Dorando Pietri serait en filiation directe avec le soldat athénien. Natif d’Emilie-Romagne, le coureur italien est ce que l’on appelle un modèle réduit : 1.59m sous la toise. Son histoire d’amour avec la course de fond débute à Carpi, en 1904. Le jeune Dorando a 19 ans et travaille dans un atelier de confection. Un jour de septembre, Pericle Pagliani, un des plus grands athlètes du moment, prend part à une course régionale. Survolté par le passage de l’athlète, Pietri court et finit la course devant la star. Précision notoire : le gamin porte ses affaires de travail. A partir de ce jour, son destin est tracé : il sera coureur de fond. En l’espace de 3 ans, l’Italien franchit les étapes et devient la référence dans la péninsule. Champion d’Italie du 5000m et du 20km, il est la terreur du fond et du demi-fond transalpin.

Cinq de chute
Dorando Pietri est l’espoir n°1 de l’Italie pour l’épreuve de marathon des Jeux olympiques de Londres, en 1908. C’est la première fois que la distance de 42,195 km est fixée, avant de devenir la norme en 1921. En guise de dernier galop d’essai, Pietri a couru une course de 40km en 2h38, un temps qui fait encore baver pas mal de coureurs. L’Italien court en negative split, commence tranquille avant de ramasser les morts, notamment le Sud-Africain Charles Hefferon, en tête jusqu’au km 39. Le soleil tape dur sur la capitale d’Albion. Quelques hectomètres après avoir avalé Hefferon, à l’agonie, c’est à son tour de morfler et de sentir la fatigue l’envahir.

Déshydraté, à la rupture, Pietri n’est plus lucide et se trompe d’entrée au moment de pénétrer dans le stade. Les juges lui indiquent le bon chemin. Exténué, l’Italien tombe. Il est relevé par les officiels. Il ne reste que 350 mètres mais ils ont tout du chemin de croix. Il tombe quatre autre fois, toujours relevé par les officiels. Au bout de dix minutes de lutte avec la gravité, Pietri passe la ligne en tête, en 2h 54 minutes et 46 secondes. Arrivé deuxième, Johnny Hayes porte réclamation. L’Américain a gain de cause : il s’empare de l’or tandis que Pietri est déclassé. Hayes croit entrer dans la Légende : il n’en reste qu’à la porte, pour l’éternité.

Au même rang qu’Enzo Ferrari
Touchée par le courage de l’Italien, la Reine Alexandra lui offre une coupe en argent pour le féliciter de sa bravoure et pour montrer sa désapprobation de la décision officielle. Arthur Conan Doyle est dépêché par le Daily Mail pour écrire un compte-rendu de la course. L’auteur de Sherlock Holmes, subjugué par Pietri, ouvre une souscription pour aider le coureur à ouvrir une boulangerie. En Emilie-Romagne. Irving Berlin, compositeur russo-américain, lui dédie la chanson «Dorando». Devenu professionnel, il est invité aux Etats-Unis pour des exhibitions, Pietri humilie Hayes au Madison Square Garden, le 25 novembre 1908. Il réédite sa performance en mars 1909. Devenu une des premières vedettes de l’athlétisme, Pietri court son dernier marathon le 24 mai 1910, à Buenos Aires. A cette occasion, il bat son record personnel : 2h 38 minutes et 48 secondes. Retraité de la course en 1911, à seulement 26 ans, Pietri ouvre un hôtel avec son frère, sans succès. Parti à San Remo, il a tenu un garage jusqu’à sa mort, en 1942, à 56 ans. L’image de Dorando Pietri est encore vivace en Italie. Pour le centenaire de ce marathon légendaire, la course lui rend hommage ainsi qu’à un certain… Enzo Ferrari, lors de la 12e étape, disputée entre Forli et Carpi. En mars 2012, la Rai Uno a diffusé le téléfilm  «Il Sogno del Maratoneta» (le rêve du marathonien), inspiré du roman de Giuseppe Pederiali, romancier passionné par la vie du coureur.  Johnny Hayes est champion olympique mais oublié des livres d’histoire qui l’ont relayé au rang d’anecdote. Dorando Pietri n’a jamais gagné de médaille d’or, mais il est une légende du sport.

François Miguel Boudet

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Le jour où Mike Powell a plané sur Carl Lewis (30 août 1991)

Le concours le plus fou de l’histoire de l’athlétisme. Cette nuit d’août 1991, Tokyo est le théâtre d’un mano a mano au sommet comme rarement le sport en a vécu. Dans le coin bleu, Carl Lewis, monument historique, multiple champion olympique, icône mondiale. Dans le coin rouge, Mike Powell, sauteur doué mais barré par le vorace Lewis, aimant à médaille. Les deux Américains sont les grands favoris de ce concours de la longueur. King Carl est le favori. Les 15 fois où il a affronté Powell, il n’a jamais perdu. La médaille d’or lui est promise.

Lewis dégaine en premier
Sur son premier saut, Powell n’atteint pas les 8m. Le natif de Philadelphie se rôde encore et ce bond n’est qu’un échauffement. En revanche, Lewis est bouillant et bondit d’entrée à 8.68m ! D’emblée, King Carl montre qui est le patron. Ses adversaires ont la pression bien comme il faut. Contraint de sauter avant Lewis, Powell doit impérativement claquer un gros saut pour rester dans le coup. S’il prend la 2e place après son 2e essai avec 8.54m, il ne parvient pas à se rapprocher davantage. A sa 3e tentative, il retombe à 8.29m. Pas terrible pour un gars capable de sauter à 8.60m. A son 4e essai, Powell croit sortir LE bond qui fera vaciller le Roi. Ça sent le 8.80 à plein nez mais… il a mordu ! Décidément, le sauteur est maudit.

King Carl plus loin que l’Araignée de l’Espace
Surtout qu’en face, Lewis est dans une autre dimension. A son 3e bond, il bat son record personnel et retombe à 8.83 ! Au 4e essai, il est à deux doigts de faire tomber le vieux record de Bob Beamon. S’il dépasse la marque de l’Araignée de l’Espace (8.91m contre 8.90), le record n’est pas homologué car le vent était trop favorable (2.9m/seconde contre 2m/seconde limite maximale autorisée). Invaincu depuis 1981, Lewis est tout simplement intouchable. Il exulte, le poing rageur. Le concours est plié et le King peut déjà aller chercher la médaille d’or. Powell semble voué à la 2e marche du podium, one more time again.

Et Powell s’envola
Sauf que ce soir, Powell n’est pas d’humeur à se faire marcher dessus. Cinquième essai. Trois premiers pas cadencés, concentré à l’extrême, Powell place méthodiquement ses foulées. La planche est parfaite. Mike s’envole. On a l’impression qu’il marche dans l’air. Quand il retombe dans le sable, il n’a qu’une crainte : que la plasticine indique qu’il a mordu. Le drapeau blanc se lève : le bond est validé. Après de longues secondes d’attente, Powell peut éclater de joie et célébrer : 8.95m ! Bob Beamon est rayé des tablettes ! Avec seulement 0.3m/seconde de vent favorable, Powell a bâché son bourreau ! Lewis dégaine deux nouveaux sauts stratosphériques à 8.87m puis 8.84m mais il était écrit que dans la nuit de Tokyo, Powell prendrait sa revanche la plus éclatante. En dépit d’une moyenne de 8.83m lors de ce concours, le Roi doit abdiquer. Powell peut fêter son titre avec son coach, Randy Huntington, et avec un juge qu’il prend dans ses bras. Son bonheur est communicatif. Il vient d’accomplir l’un des plus grands exploits de l’Histoire. Non seulement il a surpassé Lewis dans le meilleur concours de la carrière mais, de surcroît, il s’approprie un record que l’on pensait inaccessible. Toutes les émotions passent dans ses yeux. On peut y lire la joie, l’incrédulité mais aussi le soulagement d’avoir enfin battu sa bête noire. Après tant d’échecs, il peut enfin se friser la moustache !

Longtemps dans l’ombre de Lewis, Powell prit ce soir-là une éclatante revanche. S’il ne devint jamais champion olympique, battu par…Lewis en 1992 et 1996, il aura été celui qui a effacé le légendaire record de Beamon. Aucun sauteur n’a pu battre cette nouvelle marque, si proche des 9m. Powell réalisa 8m99 à Sestrières non homologués à cause du vent trop fort[1]. Même le Cubain Ivan Pedroso, le plus bel héritier du duo américain, n’a pu dépasser cette marque. Cela fait 21 ans que Powell a plané que Lewis et son record ne semble pas près de tomber.


[1] Lors de cette réunion, la divine Heike Drechsler a réalisé 7.63m, soit 18cm de plus que son record du monde établi à Tallinn le 21 juin 1986 et égalé à Dresde le 3 juillet 1986. Pour la même raison que Powell, le record n’a pas été homologué par l’IAAF.

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Le jour où Marco Pantani a survolé l’Alpe d’Huez (19 juillet 1997)

C’était il y a 15 ans. C’était avant les casques obligatoires, avant les oreillettes, avant l’affaire Festina. C’était l’époque des commentaires de Patrick Chêne et de Bernard Thévenet, de Jean-René Godard sur la moto 1 et des « chutes à l’arrière » annoncées par Jean-Paul Ollivier. Le 19 juillet 1997, Marco Pantani a muté. Il est sorti de son enveloppe terrestre pour se transformer en fusée Ariane. En 37 minutes et 35 secondes, le Pirate a dompté les 21 lacets de l’Alpe d’Huez pour battre le record de la mythique ascension.

En juillet 1996, le cyclisme découvre Jan Ullrich, rouquin allemand de 22 ans formé à l’école de l’Est. Equipier de luxe de Bjärne Riis, transfuge de la Gewiss-Ballan dont la grande majorité des membres avait un taux d’hématocrite proche des 60%, Ulle termine deuxième du Tour. Pour une première participation, c’est pas trop mal. L’année suivante, l’Ogre de Rostock est le grand favori de l’épreuve. Son principal adversaire est Italien et se nomme Marco Pantani. Couvé à la Carrera au côté du Diablo Claudio Chiappucci, Pantani est un grimpeur ailé. En 1994, il a dérouillé Evgueni Berzin et Miguel Indurain dans le Mortirolo, légendaire col du Giro. Déjà vainqueur de l’Alpe d’Huez en 1995, le Romagnol revient en forme après plusieurs galères. Alors qu’il avait terminé 3e des Mondiaux disputés en Colombie et remportés par Abraham Olano, l’Italien est percuté par une voiture sur Milan-Turin et reste sur le carreau avec une fracture ouverte tibia-péroné. Arrivé au sein de la Mercatone Uno, il est contraint à l’abandon sur le Giro, après une gamelle provoquée par un chat. Malgré la guigne, Pantani revient à son meilleur niveau et arrive sur le Tour le couteau entre les dents.

Dès les premières rampes de l’Alpe, Pantani jette sa casquette jaune et place une accélération sèche malgré le rythme élevé mené par la Festina à l’entrée du premier lacet. Seuls Richard Virenque, Jan Ullrich et Bjärne Riis, tenant du titre et gregario plaqué or à la Telekom, parviennent à le suivre. Fernando Escartin était sur le point de faire la jonction; il dit adieu à ses espoirs de retour. Très vite, le maillot à pois suffoque, ses guiboles brûlent. Richard Cœur de Lion concède un mètre, deux mètres, dix mètres et lâche prise. Riis a déjà sauté et est relégué loin derrière son leader et le grimpeur chauve. Ullrich s’accroche, se bat avec son vélo, essaye de s’arracher à la pente afin de rester dans la roue de l’Italien. Mais le mano a mano avec le Maillot Jaune ne s’éternise pas. Le Pirate est pressé et part à l’abordage. L’Allemand, cul sur la selle, roulant tout en force, ne peut amortir les relances assassines du Romagnol. Pantani s’évade pour de bon. La foule, massée des deux côtés de la route, éructe. Elle porte Elefantino, parfois jusqu’à l’excès. Un tifoso grimé en indien en fait les frais et prend un taquet. Equipé d’un cadre Bianchi d’un kilo seulement, Pantani plane sur l’asphalte. C’est lui le Roi de la Montagne. Personne ne lui arrive à la socquette. Son rapport poids-puissance est tout simplement phénoménal. Il est né grimpeur. Quand on regarde son ombre, on devine les ailes de Federico Bahamontes, l’Aigle de Tolède. Les sommets situés à 2000m d’altitude font trembler ses adversaires. Lui, son regard s’illumine quand il pointe les cimes. Dans son maillot jaune et bleu de la Mercatone Uno, Pantani étouffe, disperse, ventile ses adversaires aux quatre coins de l’Alpe. Sous le cagnard de juillet, Pantani n’est plus cycliste ; c’est un sherpa sur le chemin de l’Everest, c’est Neil Armstrong sur la Lune. Charly Gaul a un héritier ! Virevoltant, le Pirate peut lever les bras. Il bat le record de la montée et remporte son second succès en haut des 21 lacets. Grandissimo Marco !

François Miguel Boudet

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La fin du Roman

Sa carrière aura été un malentendu. Trop lent pour certains, génial pour d’autres, inadapté pour le football européen, idole en Amérique du Sud, Juan Roman Riquelme n’a jamais fait l’unanimité. Pourtant, l’Argentin a laissé une trace indélébile chez les amoureux des meneurs de jeu à l’ancienne. Après la finale de Libertadores perdue face au Corinthians, le crack de la Bombonera a tiré sa révérence chez les Bosteros. S’il envisage de jouer encore un an, la carrière de Roman s’est véritablement arrêtée mercredi soir, au stade Pacaembu.

Un à un, il les a tous embrassés. Joueurs, membres du staff, tous ont eu droit à un abrazo. La finale retour de la Copa Libertadores n’a laissé aucun suspense : au-dessus de son adversaire, le Corinthians remporte le précieux trophée pour la première fois de son Histoire. Un doublé d’Emerson a empêché Boca Juniors de glaner son septième titre continental et de battre le record d’Independiente. Le stade Pacaembu est tout à sa joie tandis que les Xeneizes rentrent au vestiaire, têtes basses. Dans les coursives, la rumeur enfle ; elle est bientôt confirmée par l’intéressé lui-même : Juan Roman Riquelme quitte Boca. Sur une jambe, régulièrement blessé, le n°10 n’en peut plus. Il jette l’éponge, cinq ans après son retour au pays.

Dans les pas de Maradona
A la recherche d’un successeur à Maradona, l’Argentine a très vite eu d’yeux que pour Roman. Et pour cause. Comme Diego, Riquelme est meneur de jeu, a été formé à Argentinos Juniors avant de devenir l’idole de Boca Juniors. Le lignage parfait en somme. En tout, Roman a joué 11 ans sous les couleurs bleu et or. Deux périodes entrecoupées d’un passage de cinq ans en Espagne, au Barça et à Villarreal. C’est Carlos Bilardo qui a convaincu Boca de recruter le «volante central». Le 10 novembre 1996, Roman entre dans le grand bain, face à l’Union  de Santa Fe. Le pibe a tout juste 18 ans. En 1998, il remporte son premier championnat. Cela faisait 6 ans que la Bombonera attendait le titre. Sous les ordres de Carlos Bianchi, Boca redevient une machine de guerre, reste invaincu pendant 40 matches et remporte une nouvelle fois le championnat. Désormais affublé du numéro 10, Roman guide les Bosteros en finale de la Libertadores. Au bout du suspense, Boca l’emporte face à Palmeiras, aux tirs au but. La fin de 22 ans de disette. A cette époque, les Xeneizes marchent sur l’eau : ils remportent la Coupe Intercontinentale en renversant le Galatique Real Madrid au terme d’un match grandiose. En 2001, ils parviennent à conserver la Libertadores face aux Mexicains de Cruz Azul. Crack incontesté, joueur sud-américain de l’année 2001, il forme avec Martin Palermo un duo exceptionnel. Le jour du dernier match de Maradona, Riquelme reçoit des mains d’El Diez un maillot de l’Idole. Le passage de témoin est éloquent. D’ailleurs, comme Diego, Roman rejoint le Barça, pour 13M$.

A un penalty de la finale
En 2002, El Torero arrive au Camp Nou. Evidemment, le Barça attend énormément de la pépite. Malgré une année chaotique, marquée par le départ de Louis « double goitre » Van Gaal en janvier 2003, Riquelme joue 30 matches en Liga, aligne les parties en Champion’s mais, malgré un record de 11 victoires, les Culés sont sortis en quart par la Juventus, future finaliste. Malgré sa saison pleine, l’arrivée de Ronaldinho bouleverse la donne. Roman plie les gaules et descend un peu plus au sud. Il atterrit à Villarreal, en prêt pour une saison.

Voisin du València CF, Villarreal a les dents longues, et avec son duo Riquelme/Forlan, l’ambition est légitimée. Lors de sa 2e saison, l’Argentin, dont l’option d’achat a été levée, devient le meilleur passeur de la Liga et porte le Sous-Marin jaune à la 3e place du classement. Inespéré mais le meilleur reste à venir.
La saison 2005/2006 est prodigieuse. Villarreal s’offre un parcours dantesque en Champion’s, passe sur le corps de MU, de Benfica, des Rangers et de l’Inter. A la dernière minute de la demi-finale retour face à Arsenal, Riquelme a le péno de la qualif’ au bout du pied mais Lehmann sort la parade de sa vie. Les Gunners valident leur billet pour le Stade de France ; Roman, celui du retour en Argentine qui intervient en 2007. 120 jours après son retour sur ses terres, il remporte face au Grêmio une 3e Libertadores, la 6e de Boca et est couronné MVP de la compétition, comme en 2001.

Le changement maudit de Pekerman
Sélectionné par Pekerman au Mondial 2006, Riquelme délivre 4 passes déc’ et régale ses collègues albicelestes. Eliminée sans gloire en 2002, l’Argentine se voit déjà le trophée entre les mains. Contre l’Allemagne, en quart de finale, Riquelme est au top. Il délivre une galette au Raton Ayala qui lui crie « es tuyo, es tuyo » pour le remercier de l’offrande. Le score est de 1-0, il reste quelques minutes mais un retour de la NationalMannschaft reste improbable. Tu parles. La jouant easy ryder, Pekerman se dit qu’il est temps de sortir Roman, histoire de le ménager. La suite est inévitable : désorganisation, égalisation de Klose et défaite aux tirs au but avec un festival de…Lehmann. Putain de chat noir le Jens.

Promesses tenues
Après un retour loupé à Villarreal, Riquelme revient à Boca, en 2008. Il en profite pour remporter la Recopa, l’équivalent de la SuperCoupe, face à l’Arsenal de Sarandi. Evidemment, l’idole y va de son but pour faire basculer le destin. Accompagné de son meilleur ennemi Martin « El Titan » Palermo et de Rodrigo Palacio, Roman gagne également le tournoi d’ouverture, au terme d’un barrage à trois, avec Tigre et San Lorenzo. De retour dans la sélection sous les ordres de Coco Basile, Riquelme renonce à l’Albiceleste lors de l’arrivée de Maradona. Le début des vaches maigres pour Boca. Deux ans plus tard, Riquelme est cramé, joue sur une patte mais surnage au sein d’un championnat argentin au faible niveau. Mais avant d’arrêter, l’Ultimo Numero Diez dont la statue trône depuis le 2 juillet 2011 devant la Bombonera, promet que les Xeneizes reviendront très vite à leur place, la première. Invaincus, ils remportent l’Apertura en 2011, ce qui les autorise à jouer la Libertadores. Quatrième du championnat de clôture, Boca atteint la finale de la Libertadores mais tombe au match retour face au Corinthians. Pour Riquelme, le voyage en Bleu et Jaune s’arrête là, au terme d’une carrière exceptionnelle.

Sous-coté en Europe, Riquelme conserve une aura exceptionnelle en Amérique du Sud. Dans plus de 30 villes argentines, des hinchas de Boca ont réclamé son retour. Las, Roman a refusé de revenir en arrière, trop fier et orgueilleux pour jouer en 50% de ses moyens pour « son » club. Pour Boca Juniors et le football, une page se tourne. Pour lui, c’est la fin du roman.

François Miguel Boudet

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L’ultime razzia de Magdalena Neuner: épisode final

Après avoir remporté quatre médailles aux Mondiaux de Ruhpolding, Magdalena Neuner mettait un terme à sa carrière la semaine dernière, lors des finales à Khanty-Mansiïsk en Sibérie, avec comme objectif de remporter un dernier Globe de Cristal et partir par la grande porte. Mieux qu’un film de Kubrick, c’est l’ultime razzia de la fiancée du biathlon.

Intouchable en sprint

Championne du monde de la spécialité à Ruhpolding, Magdalena Neuner remporte l’épreuve de sprint malgré deux fautes au tir. Tandis que sa dauphine, l’Ukrainienne Vita Semerenko termine deuxième avec un 10/10, Lena prouve encore qu’elle est une véritable fondeuse de haut niveau. Accessoirement, elle démontre aussi que le tir a toujours été son point faible.

Grâce à ce succès, Lena prend quasi-définitivement la mesure de Darya Domracheva au classement général. Victime d’un problème de fart, la Bélarusse n’a pu faire mieux que troisième alors qu’elle n’avait commis qu’une seule faute.

Le dernier week-end de biathlète de Neuner débute on ne peut mieux puisqu’elle s’adjuge le petit globe en poursuite, le troisième de sa carrière.

La revanche de Domracheva

Remise de sa contre-performance, Domracheva prend sa revanche sur la Bavaroise lors de la poursuite, comme aux Championnats du Monde. Si Kaisa Mäkäräinen, quatrième en sprint, se relève après son échec aux Mondiaux en terminant deuxième, Lena réalise une immense performance à skis. En dépit de 5 fautes au tir, dont quatre lors des deux derniers passages, elle accroche une belle quatrième place, à moins d’une minute de Domracheva et son 18/20. Alors qu’elle n’avait manqué qu’une seule cible, Tora Berger termine derrière l’Allemande, tout comme Marie-Laure Brunet pourtant auteur d’un sans-faute.

Sortie pas la grande porte

Pour sa dernière course, Lena est en tête après les deux premiers passages au tir avec un 10/10. Tout se passe comme dans un rêve sauf qu’à la troisième séance, Neuner arrose et écope de…4 tours de pénalité ! Evidemment, ses rivales en profitent, d’autant plus qu’elle manque à nouveau deux cibles. Mais malgré un 14/20, l’Allemande termine cinquième sur la ligne. Elle est reclassée sixième car Brunet bénéficiait d’un bonus de 6 secondes après qu’elle a été gênée sur le pas en tout début d’épreuve. Souriante, Magdalena Neuner pouvait savourer. Car si Domracheva venait de l’emporter, Lena s’offrait un dernier gros globe de cristal, le troisième de sa carrière. Ou comment réussir sa sortie.

Epilogue

En six saisons complètes, Magdalena Neuner aura réussi ce que peu de biathlètes, hommes et femmes confondus, ont réalisé sur des carrières plus longues. Double championne olympique, douze fois championne du Monde, triple vainqueur du gros Globe de Cristal, vainqueur au moins une fois de chaque spécialité (sprint, poursuite, individuelle et mass-start), Lena laisse une empreinte indélébile sur son sport. Sur les 175 courses qu’elle a disputé, elle en a remporté 34 en individuel et 13 en relais (dont 3 en mixte, épreuve non-olympique) soit un taux de victoires de près de 27% ! Tout simplement incroyable, surtout quand on connaît son faible rendement au tir debout. A cela s’ajoutent 35 podiums et 137 Top 10. En tout, elle n’a loupé les points qu’à…trois reprises ! Avec 42 premières places en Coupe du Monde, seule Forsberg la devance en termes de succès. Au passage, quel est le prénom de la Suédoise ? Magdalena ! Vous savez ce qu’il vous reste à faire si vous voulez que votre fille devienne une championne de biathlon !

Désormais, Magdalena Neuner va pouvoir se consacrer à sa vie privée, notamment son souhait de fonder (sans jeu de mots) une famille. Sa retraite sportive met également la Mannschaft devant ses responsabilités, elle qui a beaucoup déçu à Ruhpolding. La fiancée du biathlon a rangé ses skis et sa carabine. A coup sûr, Lena va laisser un grand vide, sur et en dehors de la piste.

Auf Wiedersen Magdalena !

François Miguel Boudet

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Je suis une Légende: Milan-San Remo

Rien n’est plus beau que l’Italie au printemps. Epreuve d’ouverture de la saison des classiques cyclistes, Milan-San Remo constitue le premier grand rendez-vous des chasseurs de courses d’un jour. Pour sa 103ème édition, la Primavera sera une nouvelle le théâtre d’une énorme bagarre. Mais avant le grand départ de samedi, coup d’œil dans le rétro de la Classicissima.

Costante Girardengo, 6 fois vainqueur de Milan-San Remo

Avant-guerre, une spécialité française

De 1907 à 1915, les Français ont souvent tiré leur épingle du jeu sur les routes lombardes et ligures. Ainsi, Lucien Petit-Breton[1] s’impose sur la Via Roma lors de la première édition. Une performance qui annonce ses succès futurs sur le Tour de France en 1907 et 1908. Par la suite, trois autres Tricolores inscrivent leur nom au palmarès de l’épreuve : Eugène Christophe (1910[2]), Gustave Garrigou (1911) et Henri Pélissier (1912). Cette hégémonie prend fin rapidement et hormis une troisième place obtenue par Charles Crupeland en 1914 et la deuxième place d’Henri Pélissier en 1920, il faut attendre…1946 pour retrouver trace d’un coureur hexagonal sur le podium de la Primavera (Lucien Teisseire) et 1951 pour voir à nouveau un Français sur la plus haute marche du podium, un certain Louison Bobet.

Costante Girardengo, première Légende

De 1914 à 1953, les coureurs Italiens trustent les victoires. Au milieu de cette razzia transalpine, seuls le Belge Joseph Demuysere (1934) et Louison Bobet (1951) parviennent à lever les bras sur la Via Roma. Parmi les coureurs qui ont marqué cette époque, Costante Girardengo tient une place particulière. En effet, de 1917 à 1928, le Piémontais n’a manqué le podium de l’épreuve qu’une seule fois, en 1927. Son palmarès sur la Classicissima laisse pantois : six victoires[3], trois deuxième place, deux troisième place ! Parmi les vainqueurs mythiques de cette époque dorée, on retrouve bien évidemment les légendaires Alfredo Binda (1929 et 1931), Gino Bartali (1939, 1940, 1947 et 1950) et Fausto Coppi (1946, 1948, 1949). Cette domination italienne s’arrête avec la seconde victoire de Loretto Petrucci en 1953 et la Botte doit attendre 17 ans pour retrouver son rang avec le succès de Michele Dancelli en 1970.

Eddy Merckx, prince de la Cité des Fleurs

Pour détrôner Girardengo et ses six victoires, qui d’autre que le Cannibale ? Entre 1966 et 1976, l’Ogre de Tervuren l’emporte à sept reprises. Seuls l’Allemand Rudi Altig (1968) et les Italiens Michele Dancelli (1970) et Felice Gimondi (1974) parviennent à se glisser sur la plus haute marche. Pas un mince exploit tant Merckx est insatiable. Et à son image, les coureurs du Plat Pays qui est le leur ne cessent de briller sur la Primavera. Ainsi, Rik Van Steenberger en 1954 à Fons de Wolf en 1981, la Belgique d’adjuge quinze éditions sur les vingt à son actif. Grand rival de Merckx, le Gitan Roger De Vlaeminck l’emporte à trois reprises (1973, 1978, 1979). Le dernier vainqueur belge sur la Via Roma serait Andreï Tchmil en 1999[4].

A gauche: Felice Gimondi, vainqueur en 1974. A droite: Eddy Merckx, 7 fois vainqueur de la Primavera.

Une affaire de spécialistes

En dépit de l’internationalisation du cyclisme depuis une trentaine d’années, Milan-San Remo reste l’apanage de l’Italie (50 victoires), de la Belgique (20 victoires) et de la France (12 victoires). Cependant, les choses changent et il faut déjà remonter à la victoire de Pippo Pozzato en 2006 pour retrouver trace d’un Transalpin victorieux. Pour autant, quand on se réfère au palmarès, certaines nationalités sont étrangement sous-représentées malgré leur tradition cycliste. Ainsi, seuls deux Allemands ont remporté l’épreuve (Rudi Altig en 1968 et Erik Zabel en 1997, 1998, 2000 et 2001), tout comme les Espagnols (Miguel Poblet en 1959 et Oscar Freire en 2004, 2007 et 2010). Néanmoins, on s’en aperçoit, il s’agit davantage de victoires épisodiques remportées par des spécialistes de ce genre d’épreuves plutôt que d’une véritable tradition. Et tandis que les Belges parviennent régulièrement à finir dans les trois premiers (4 podiums lors des 5 dernières éditions), les Néerlandais ne comptent que trois vainqueurs dans leurs rangs (Arie den Hartog en 1965, Jan Raas en 1977 et Hennie Kuiper en 1985) et leur dernier podium date de 1989 (Frans Maassen derrière Laurent Fignon). Une incongruité. Enfin, témoin de l’émergence de nouveaux pays dans le concert mondial, l’Australien Matthew Goss est devenu le premier non-Européen à s’imposer à San Remo l’an dernier, au terme d’une course brillante, ce qui lui a permis de s’affranchir de l’influence de Mark Cavendish.

 

Lever les bras sur la Via Roma, après avoir dompté la Cipressa et le Poggio, est un honneur réservé à seulement quelques fuoriclassi. Que l’on soit un puncheur capable de sortir à la flamme rouge et de résister à tout un peloton comme Spartacus Cancellara en 2008, un sprinteur imbattable comme Mario Cipollini en 2002 ou un parfait inconnu réussissant un coup d’éclat comme Marc Gomez en 1982, triompher à San Remo, c’est appartenir pour l’éternité à une longue lignée des champions. Samedi, ils seront près de 200 à s’élancer de Milan avec ce rêve en tête.  Et se rappeler pour toujours que rien n’est plus beau que l’Italie au printemps.

François Miguel Boudet


[1] De son vrai nom Lucien Mazan. Vainqueur de 9 étapes sur le Tour de France, il meurt à Troyes pendant la Première Guerre Mondiale à l’âge de 35 ans.

[2] Dans des conditions cataclysmiques (30 cm de neige), Eugène Christophe est un survivant : sur 63 partants, seulement 4 rejoignent l’arrivée !

[3] Costante Girardengo (1893-1978) a gagné les éditions 1918, 1921, 1923, 1925, 1926 et 1928.

[4] Serait seulement car personne ne sait vraiment quel est le pays d’Andreï Tchmil. Né Soviétique sur le territoire russe, il a défendu les couleurs de l’URSS, de la CEI, de la Russie, de la Moldavie et de la Belgique. Après avoir conseillé diverses équipes dont l’équipe Katusha et avoir occupé de hautes fonctions dans le sport moldave, Tchmil songerait à devenir président de l’UCI cette année. Ce qui ne nous dit toujours pas sa nationalité.

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Spartacus, un lion dans le moteur

La saison des classiques approche avec, au programme de ce samedi, le premier des monuments du calendrier : Milan – San Remo, la Primavera. L’un des favoris pour la gagne sera une fois encore le suisse Fabian Cancellara, deuxième l’an passé derrière l’Australien Matthew Goss et devant le Belge Philippe Gilbert. Partons à la découverte de Spartacus.

Le Suisse, né à Berne, va cette année sur ses 31 ans, âge qui laisse encore quelques années devant lui quand on voit certains coureurs tel Chris Horner ou Levi Leipheimer. Il fait partie de la grosse équipe Radioshack Nissan, équipe des frères Schleck. Cancellara est avant tout un gros rouleur, spécialiste du contre-la-montre et des classiques dites « flandriennes » : Paris-Roubaix, le Tour Des Flandres pour ne citer que celles-ci. Cancellara est avant tout un gros moteur. Quadruple champion du monde du contre la montre, champion olympique dans le même exercice, plusieurs fois champion de Suisse sur la course en ligne et vice champion olympique de la course en ligne. Ajoutez à cela 2 Paris-Roubaix, un Tour des Flandres, et un Milan – San Remo, et vous avez là le plus beau du palmarès de l’Helvète.

Formé à la Mapei, révélé par Riis

Fabian Cancellara fait ses classes à la Mapei puis à la Fassa Bortolo. Dans ses deux équipes, il est équipier et est chargé d’aider ses leaders en plaine notamment. A la Fassa Bortolo, il est chargé de rouler dans le final pour mener à bien le sprint de son équipier Petacchi. Il a dejà à cette époque là, de très bonnes aptitudes pour rouler. En 2006, il rejoint Bjarn Riis et la Team CSC (aujourd’hui Saxo-Bank). Il prend, sous la houlette de Rii,s une autre dimension et des galons de leader. Dès cette année-là, il remporte Paris – Roubaix en battant Tom Boonen. A la fin de l’année, il remporte son premier titre de champion du monde de CLM. En 2007, ses victoires se concentrent sur les CLM et sur une étape du Tour de France. En 2008, il réalise une excellente année, avec une medaille d’or et une médaille de bronze (qui deviendra en argent suite au declassement du second) au JO de Pekin, et une victoire sur la classique Milan – San Remo. En 2009, il est en méforme pour les classiques printanières mais se rattrape en remportant un Tour de Suisse taillé sur-mesure, en portant durant 6 jours le maillot jaune sur le Tour et en portant 5 jours le maillot de leader de la Vuelta. Et il remporte une nouvelle fois le titre de champion du monde de CLM et finit 5e de la course en ligne. En 2010, il signe un retentissant doublé Paris-Roubaix et Tour des Flandres, durant lesquels il impressione par sa force et sa maitrise. Il est suspecté de tricherie par la télévision italienne mais cela sera sans suite. A la fin de l’année, il quitte l’équipe de Bjarn Riis, pour aller dans la nouvelle équipe des frères Schleck, la Team Leopard. Durant l’année 2011, il decevra pendant la periode des classiques mais il reussit quand même à accrocher quelques places d’honneur.

2012, l’année du retour

Cette année, le Suisse fait des classiques printanières un de ses objetifs, et il sera un des favoris mais n’aura pas l’étiquette d’homme à battre qu’il avait l’année dernière. Il sera marqué, mais un peu moins tout de même. Il pourra profiter de l’attention que focalise Boonen pour se faire un peu oublier, le Belge étant en pleine bourre en ce début de saison. Mais Spartacus a refait parler de lui dernièrement, en remportant brillament la classique italienne des Strade Bianche et s’offrant le chrono de Tirreno-Adriatico mardi dernier. Il prouve qu’il faudra compter sur lui pour tenter quelque chose à Milan – San Remo. Le Suisse, qui va aussi tâcher de reconquerir sa place de numéro un du contre-la-montre, Tony Martin l’ayant dépossedé l’année dernière. Mais nous sommes en année olympique, et il est certain que Cancellara fera des JO un de ses objectifs principaux.

En attendant le rendez-vous londonien, Spartacus saura se battre cette année pour encore remporter de belles courses, avec pourquoi pas Milan – San Remo dès samedi ?

Damien Dufresne

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Martin Fourcade, ce n’est qu’un début

Il a survolé les championnats du Monde de biathlon. Dans le Temple de Ruhpolding, Martin Fourcade a remporté trois titres individuels agrémentés d’une médaille d’argent en relais. Au coude à coude avec le Norvégien Emil Svendsen pour remporter la Coupe du Monde générale, le parcours du cadet de la fratrie a fait preuve d’un état d’esprit exceptionnel pour s’affirmer comme le véritable patron de la discipline.

Un apprentissage express

La trajectoire de Martin Fourcade est fulgurante. Des débuts en Coupe du Monde en 2008, à seulement 20 ans, le natif de Céret suit les traces de son frère Simon et s’installe en Equipe de France en 2008/2009. Trois places dans les dix premiers témoignent de son potentiel. Cela tombe bien, les Jeux Olympiques approchent. Et de talent brut, Martin devient un véritable outsider au podium, à la faveur de plusieurs Top 10 en Coupe du Monde. Sauf que ses résultats à Vancouver sont décevants : 35ème du sprint, 34ème de la poursuite, 14ème de l’individuelle, 6ème en relais. Dernière épreuve, la mass-start lui réussit. Derrière le Russe Ievgueni Oustiougov, Fourcade se pare d’argent. Dans la foulée, il monte pour la première fois sur le podium d’une Coupe du Monde, enchaîne trois victoires de rang, deux en poursuite et une en sprint. Pour sa deuxième saison, il s’adjuge le petit globe de cristal en poursuite et finit cinquième du classement général après avoir longtemps espérer le remporter.

Attendu au tournant, le Catalan poursuit sa progression. Et après avoir été vice-champion olympique, il remporte trois médailles aux Mondiaux de Khanty-Mansiïsk. Troisième du relais mixte, vice-champion du Monde du sprint derrière l’Allemand Arnd Peiffer, il se paie le luxe d’obtenir son tout premier titre mondial en grillant la politesse aux Norvégiens Tarjei Boe et Emil Svendsen lors de la poursuite. En revanche, il finit derrière eux au classement de la Coupe du Monde générale. Quoi qu’il en soit, le gamin progresse et apprend vite.

Sur les traces de Raphaël Poirée 

Malgré les titres olympiques de Vincent Defrasne en 2006 et Vincent Jay en 2010, la France du biathlon espérait l’éclosion du successeur de Raphaël Poirée. Octuple champion du Monde, le Drômois a pris sa retraite sportive en 2007, après un ultime duel épique avec son éternel rival, Ole Einar Bjorndalen. Depuis lors, les Bleus se cherchaient une locomotive. Une chose est certaine, en 2012, ils l’ont trouvée.

Triple champion du Monde la semaine dernière à Ruhpolding, Martin Fourcade est en passe de remporter le globe de cristal de la Coupe du Monde générale. Avec 6 victoires cette saison contre 3 pour son dauphin Svendsen, Fourcade dispose de 66 points d’avance sur le Norvégien avant les finales à Khanty-Mansiïsk.

Ce qui a le plus étonné lors des Mondiaux, c’est la faculté qu’a eu Fourcade à se remettre en question. Car après avoir craqué face à Svendsen lors du relais et face à la déception de ses coéquipiers qui avaient réalisé une grande performance, Fourcade n’a laissé la personne d’autre la possibilité de croire en une victoire lors de la mass-start. Impérial à skis, son gros point fort, Fourcade a placé une dernière mine lors du dernier tronçon pour décrocher le Suédois Bjorn Ferry, là où son compatriote Carl-Johan Bergman avait également cédé en poursuite : « Sous une pluie battante, je suis allé chercher la réaction d’orgueil que j’attendais suite à mes mauvais tirs du relais et de l’individuel pour accrocher une troisième médaille d’or. J’avais ciblé cette mass-start avant le début des championnats sachant qu’elle serait particulièrement difficile à gagner. Ce fût le cas! ».

 

Auteur d’une immense performance à Ruhpolding, Martin Fourcade a démontré que, malgré son jeune âge, il avait les facultés nécessaires pour enchaîner les courses, rester concentré sur son tir et conserver un niveau incroyable à skis. En compagnie de son frère Simon, Fourcade a emmené dans son sillage le reste de l’Equipe de France qui a décroché 8 médailles mondiales. L’avenir appartient à Martin Fourcade et cette razzia ne sera certainement pas la dernière.

 

François Miguel Boudet

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On parle tous football: « c’est quoi ces plots?! »

Cette rubrique est destinée à tous ceux qui n’ont jamais mis les pieds dans un stade et qui veulent connaître les us et coutumes des supporters. Comme dans n’importe quel lieu de culte, il existe des rituels particuliers incontournables. Pour ne pas arriver totalement dépourvu, il est de bon ton que vous ayez quelques notions linguistiques basiques.

Leçon n°8: de l’utilisation de l’expression « c’est quoi ces plots?! »

Confortablement installé en virage depuis 2 heures, vous avez lu et relu l’article de L’Equipe qui parlait du match décisif que vos protégés s’apprêtent à jouer. En guise de vocalises, vous vous être échauffé la voix avec divers chants ayantprincipalement pour propos la sexualité du joueur vedette de l’équipe adverse.

Las, au bout de 10 minutes, vous en avez déjà pris deux dans les gencives et ça ne va pas en s’améliorant. Vos favoris paraissent un brin trop crispés et totalement à l’ouest. Au troisième pion encaissé, la défense est aussi périmée qu’un Actimel coincé dans votre frigo depuis 8 mois; vous n’en pouvez plus, vous avez besoin de vous épancher bruyamment auprès de votre voisin.

Désormais, vous connaissez le rituel. Crachez un bon coup en évitant de préférence la personne devant vous, lâchez un bon ‘putain ah!’ et prenez à témoin votre voisin le plus réceptif. Si vous êtes tactile, un peu comme ces filles qui ont besoin de palper la marchandise quand elles vous parlent, prenez-le par l’épaule. N’en faites pas trop non plus, cela pourrait être mal pris. Vous êtes dans un stade que diable! Prenez votre respiration et lancez très distinctement: ‘c’est quoi ces plots?!’. Normalement, votre acolyte corroborera vos propos car il a également espéré et payé pour assister à une rouste humiliante.

Dans le but de rendre votre diatribe plus virulente, vous pouvez customiser. Ainsi, Vous pouvez commencer avec votre saillie par un ‘mais’ accentué. Ensuite, bien que vous ayez gueulé un ‘putain ah!’ quelques secondes plus tôt, n’hésitez pas à le répéter en fin de phrase. La redondance n’est pas un problème dans un tel cas de figure. Histoire d’ajouter un accent, vous pouvez agrémenter d’un ‘là’ pour que tout le monde comprenne bien que ce sont bien les joueurs sur la pelouse qui sont nases. C’est parfaitement inutile, c’est entendu, mais cela augmente la tension des propos. Enfin, vous pouvez poursuivre votre envolée lyrique par un ‘je le crois pas ça!’ (négation inutile) ou un ‘c’est pas possible ça’ (voir remarque précédente pour la négation). Important: veuillez appuyer sur le ‘ça’ car cela augmente votre sentiment d’exaspération.

Si vous optez pour l’option tuning ultra +, le résultat en bout de chaîne peut être: ‘Putain ah! Mais c’est quoi ces plots là putain?! Je le crois pas ça oh! C’est pas possible ça putain!’. Oui c’est grossier. Mais on n’a jamais dit qu’il ne fallait ne pas l’être. Et puis, une bonne insulte vaut des fois mieux qu’un long discours. Surtout dans une enceinte bondée.

Toujours en quête de connaissances, le stade devient votre maison et votre assurance ne cesse de prendre de l’ampleur. Continuez, vous êtes sur la pente ascendante.

François Miguel Boudet

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L’ultime razzia de Magdalena Neuner: épisode 3

Pour ses derniers Championnats du Monde, Magdalena Neuner voulait tout rafler sur la neige de Ruhpolding. Après avoir raté son individuelle, la Bavaroise voulait réussir un grand relais avant le feu d’artifice final lors de la mass-start. Mieux qu’un film de Kubrick, c’est l’ultime razzia de la fiancée du biathlon.

De gauche à droite: Andrea Henkel, Miriam Gössner, Magdalena Neuner et Tina Bachmann

Après sa défaillance lors de l’individuelle avec six fautes au tir et autant de minutes de pénalité, Magdalena Neuner n’avait qu’un seul objectif en tête : remporter l’or avec l’équipe d’Allemagne. Si, d’ordinaire, la Mannschaft fait toujours figure de favorite, les mauvais résultats obtenus jusqu’alors laissaient croire que la première marche du podium ne lui était pas dévolue. En effet, la Norvège, la Russie et la France pouvaient prétendre à bien mieux qu’un simple accessit derrière les ouailles d’Uwe Müssiggang et Ricco Gross.

A l’image de Björndalen

Après un premier relais quasi-parfait avec seulement une pioche[1], ce qui lui permit de franchir la ligne en même temps que Marie-Laure Brunet, Tina Bachmann lança idéalement Neuner. Dans le premier tronçon, Lena distança Sophie Bolley mais commit trois erreurs au tir couché, erreurs sauvées par trois pioches. Malgré dix secondes de retard sur la Slovaque Kuzmina passée en tête, Neuner revint skis dans skis avant le tir debout, son point faible. Complètement hors du coup, la Bavaroise manqua trois cibles et dut accomplir un tour de pénalité, laissant Kuzmina et Boilley, auteur d’un brillant 5/5, repartir devant elle avec vingt secondes d’avance. Toute analogie avec le relais loupé d’Ole Einar Björndalen la veille (un tour de pénalité également) ne serait pas fortuite[2]. Mais au prix d’un gros effort, Neuner combla la moitié de son retard et transmis le relais à Miriam Gössner avec seulement dix secondes de débours. De l’aveu même de Magdalena, Gössner n’aime pas partir devant car cela la crispe plus qu’autre chose. Un mal pour un bien en somme.

Avec deux pioches au tir couché, « Miri » repartit du pas en troisième position derrière la France et la Slovaquie. Au coude à coude avec Anaïs Bescond, Gössner ne piocha qu’une seule fois contre deux à la Française et s’empara ainsi de la première place avant le relais décisif.

La qualité Henkel

Capable du meilleur (20/20 lors de la poursuite) comme du pire (7/10 lors du sprint ; 16/20 lors de l’individuelle), Andrea Henkel s’élança donc en tête avec comme objectif de résister aux assauts de Marie Dorin Habert, l’une des meilleurs tireuses du circuit. Fort heureusement pour la Mannschaft, la camarade de chambrée de Neuner était dans un jour faste. Et tandis que Dorin Habert n’avait pas encore tiré une seule balle, Henkel repartait du pas après une série aussi rapide que précise.

Cependant, les Dieux du biathlon sont versatiles et peuvent distribuer un bon coup de latte lors du dernier tir debout. Alors, en dépit son avance, Henkel ne restait pas à l’abri d’une défaillance. Sous les cris et les acclamations des supporters allemands, elle réussit un nouveau sans-faute. L’or ne pouvait plus échapper à la Mannschaft qui l’emporta devant la France et…la Norvège, extrêmement moyenne jusqu’au relais de Tora Berger, absolument extraordinaire en cette deuxième partie de championnats et qui, grâce à une accélération décisive, lâcha irrémédiablement Darya Domracheva.

Ainsi, Magdalena Neuner, sans avoir été la meilleure, se paraît d’or pour la 12ème fois de sa carrière !

Lena arrose, Tora s’impose

Bouquet final, la mass-start de dimanche s’annonçait dantesque. Entre une Tora Berger époustouflante, une Magdalena Neuner toujours aussi imprévisible, sans oublier Darya Domaracheva, Marie-Laure Brunet et une Andrea Henkel retrouvée depuis son carton en relais, cette ultime course constituait un magnifique point final de ces Mondiaux de Ruhpolding.

Et le feu d’artifice, nous l’avons eu ! Totalement inexistante lors de ces Championnats du Monde, la Finlandaise Kaisa Mäkäräinen, vainqueur de la Coupe du Monde générale la saison dernière, réussit une course quasi-parfaite, à l’image de Marie-Laure Brunet, sans doute la meilleure tireuse, hommes et femmes confondus. Dans le même temps, Tora Berger ne fait pas mentir son statut de favorite et, en dépit d’une faute lors du premier debout (nda : le premier passage debout), est bien partie pour remporter une nouvelle médaille. Auteur d’un très moyen 12/15 avant le dernier tir debout, Magdalena Neuner et Darya Domaracheva sont encore en lice pour obtenir un podium.

Juges de paix, les cinq dernières cibles sont fatales pour Lena qui arrose et en est quitte pour trois tours de pénalité. Domracheva ne s’en sort guère mieux et en rate deux. Impeccables jusqu’alors, Mäkäräinen et Brunet commettent leur première erreur. En embuscade, Berger ne tremble pas et toutes les trois repartent ensemble du pas de tir. Sans surprise, Berger se détache et s’offre une troisième médaille d’or, imitant Martin Fourcade, vainqueur de la mass-start quelques heures plus tôt. Dans un dernier effort, Marie-Laure Brunet devance Kaisa Mäkäräinen et remporte sa troisième médaille d’argent en quatre jours. Suivent ensuite l’Allemande Tina Bachmann et Darya Domracheva. Marie Dorin Habert est encore placée et finit sixième.

Le podium de la mass-start: Tora Berger (3), Marie-Laure Brunet (4) et Kaisa Mäkäräinen (9)

Suite à la disqualification de la Russe Olga Zaitseva, Magdalena Neuner se contente de la dixième place. Elle peut nourrir beaucoup de regrets puisqu’avec six fautes au tir, soit le pire total des trente concurrentes, la Bavaroise n’a eu qu’une minute de retard sur Tora Berger !

Avec quatre breloques autour du cou dont deux en or, Magdalena Neuner peut tout de même être satisfaite de ses derniers Mondiaux. Cependant, avec un meilleur tir, elle aurait pu écraser la compétition. La semaine prochaine, à Khanty-Mansiïk en Russie, Lena tentera de remporter pour la troisième fois le Globe de Cristal de la Coupe du Monde générale. L’occasion de marquer encore un peu plus l’histoire du biathlon et d’écrire l’épisode final d’une carrière éblouissante.

François Miguel Boudet

Si vous avez raté les épisodes précédents: Magdalena Neuner, la fiancée du biathlon / L’ultime razzia de Magdalena Neuner: épisode 1 / Episode 2 


[1] En relais, les biathlètes disposent de trois pioches en cas d’échec. Chaque pioche doit être insérée dans la carabine individuellement. Ce règlement évite au maximum les tours de pénalité qui rendraient la course trop longue.

[2] Parti en position de premier relayeur, Björndalen piocha trois fois et effectua un tour de pénalité. Treizièmes, les Norvégiens revinrent progressivement et l’emportèrent grâce à la maîtrise de Svendsen face à Martin Fourcade lors du dernier tir debout.

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